En 2017, le dernier artisan fourreur de la place dijonnaise va se retirer de la scène commerçante locale. Jean-Luc Morizot prend sa retraite. Le petit monde de la fourrure entame un dernier hiver en pente douce.
Photos : Christophe Remondière
Modèle : Laure Mattioli, miss Bourgogne 2001
« Je n’ai jamais eu autant de sollicitations ! » Depuis qu’il a (enfin) avoué avoir l’âge de la retraite (la soixantaine l’attend au tournant), Jean-Luc Morizot a provoqué des réactions en chaîne parmi la gente féminine dijonnaise. Cet homme de l’art, icône indissociable du commerce local et de la rue Charrue, dont l’empathie est aussi chaleureuse qu’un vison par moins quinze degrés, va donc quitter la scène avec les honneurs. L’histoire ne dit pas encore quand précisément. Mais 2017 est le bon calendrier. Il signera d’une certaine façon cette désaffection progressive dont la fourrure a été victime, parfois sans discernement. Le temps des sauvagines n’est plus, ce qui, paradoxalement, fait de Jean-Luc Morizot un homme rare, un homme au poil pour qui veut restaurer son précieux manteau. Le marché de l’occasion est actif sur le net. Il est le signe d’un changement radical de comportement. À croire que la fourrure est déjà un outil potentiellement spéculatif parce que condamné par les nouvelles habitudes de consommation, écologiques ou économiques.
RADIEUX TESTAMENT
Un fait demeure selon l’artisan-commerçant : « Investir dans les habits n’est plus dans l’air du temps, aujourd’hui, la dépense des foyers dans le textile et l’habillement atteint péniblement les 3%, alors que l’on dépense en moyenne plus de 9% de son budget dans les communications ». Ceci expliquant effectivement cela. Alors, comme un hommage bien senti, Femmes en Bourgogne invite ses lectrices à prendre la mesure des enjeux pour ce métier qui, selon la formule consacrée (fort ironique en la circonstance), est en voie de disparition. Portées par la délicieuse ancienne Miss Bourgogne 2001 Laure Mattioli, les fourrures de l’atelier Morizot sont ainsi le testament radieux d’une époque quasi révolue. Mais il y aura un après. Jean-Luc et son épouse pensent déjà à faire vivre le 24 de la rue Charrue sous une autre forme. Patricia y sera encore après le départ de son mari pour assurer les travaux d’entretien à la demande. Pas question de laisser les clientes dans le désarroi ! Le local sera aussi un lieu de partage pour les artisans, un atelier créatif qui mettra en avant plusieurs savoir-faire à tour de rôle et à des degrés divers. Cuirs, chapeaux, sacs à main, bijoux et autres… les pistes ne manquent pas. « Ça n’est pas parce qu’un commerce s’éteint qu’il n’y a plus de besoin » conclut avec philosophie Jean-Luc, dont l’éternelle jeunesse doit beaucoup sans doute à l’artère dijonnaise où il vit le jour : la bien nommée rue de Jouvence.